Résumé
Pour l’essentiel, le droit de la Convention européenne a subi depuis cinquante ans une double évolution, l’extension de son empire étant prolongée par une meilleure application au niveau national. En dehors de la diversité des droits eux-mêmes, l’extension du droit de la Convention doit beaucoup aux méthodes retenues par la Cour européenne pour les interpréter, d’une manière toujours dynamique et finaliste. Les voies de cette extension sont nombreuses, qu’il s’agisse, par exemple, de l’interprétation fonctionnelle des limitations de souveraineté ou de la théorie des «obligations positives». Ces efforts ne dispensent pas d’apporter à la Convention, le cas échéant, un complément normatif. Un réel ordre européen des libertés requiert encore une amélioration apportée au niveau de l’application de ces normes en droit national, non seulement dans le cadre de l’exécution des arrêts, mais en dehors même de tout contentieux. Dans les deux cas, c’est l’idée de prévention qui domine. Comme en matière de mesures conservatoires ou provisoires, la pratique du Comité des droits de l’Homme des Nations Unies révèle une remarquable synergie. Ces progrès ne doivent pas faire oublier cependant la nécessité d’une meilleure cohérence et d’une transparence accrue de la jurisprudence européenne. L’«ordre européen des libertés», que l’on porte haut, interdit plus que jamais les errements. Désormais seule à instruire les requêtes des individus, qui – phénomène unique au monde – s’adressent directement à elle, la Cour de Strasbourg doit faire face à une surcharge de travail qui expose paradoxalement l’individu au risque de déni de justice, et qui rend la réforme urgente, afin de suppléer aux faiblesses de la réforme introduite par le Protocole 11. Au moment de la rédaction de cette étude, la Conférence ministérielle européenne sur les droits de l’Homme ne s’était pas encore tenue. Des nombreuses interventions, de la Déclaration politique et des résolutions adoptées, il résulte la volonté la plus large de réaffirmer le rôle central que la Convention doit jouer en tant qu’«instrument constitutionnel de l’ordre public européen». C’est pourquoi, tout en saluant l’adoption d’une Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, les Ministres veulent éviter tout conflit entre les deux systèmes de protection et évoquent à nouveau l’adhésion de la Communauté à la Convention. Concernant le nouveau Protocole 12 sur la non-discrimination, il a été, dès le 4 novembre, signé par 25 États.
Abstract
In a nutshell, the evolution that the Law of the European Convention has undergone for the last fifty years is two-fold: indeed, the extension of its realm was served by a better implementation at the domestic level. Besides the actual diversity of the protected rights per se, the constantly dynamic and purposeful methods of interpretation used by the Court also served the extension of the Law of the Convention. The path leading to this extension in this regard is widely open, whether it be through the functional interpretation of limits on State sovereignty or through the « positive obligation » theory. However, these efforts should not prevent from adding to the normative content. A true European order also requires that domestic implementation of these provisions be improved, not only with the implementation of decisions but also in the absence of a conflict brought before the Court. In either of these, the prevailing idea is that of prevention. As for conservatory and provisional measures, the practice of the United Nations Human Rights Committee portrays a remarkable synergy. However, these improvements should not overshadow the need for European case law to be increasingly coherent and transparent. Digressions from this «fundamental public order of freedoms» have never been prohibited.
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